1. Un morceau pour la Nintendo 3DS ?

Iwata :

Aujourd’hui, j’ai à mes côtés l’équipe qui a travaillé sans relâche pour donner à la Nintendo 3DS sa forme actuelle. Commençons par les présentations.

Koshiishi :

Je m’appelle Koshiishi du groupe de conception mécanique du service recherche et ingénierie. J’étais responsable de la conception mécanique au cours du développement de la console Nintendo 3DS. Nous avons été nombreux à travailler sur la conception mécanique, mais Goto-san, responsable de la conception à proprement parler, et moi-même sommes là pour représenter le groupe. Je suis heureux d’être ici.

Iwata Asks
Goto :

Je me présente : Goto. Je viens également du groupe de conception mécanique du service recherche et ingénierie. Comme Koshiishi-san vient de le dire, j’étais chargé de concevoir la partie mécanique de la console. J’ai pris part à ce projet à son tout début et je l’ai suivi jusqu’au lancement de la production à grande échelle, à la fin.

Iwata Asks
Iwata :

Certains lecteurs peuvent ne pas bien voir ce que la conception mécanique recouvre. Pourriez-vous nous donner quelques explications ?

Goto :

Bien sûr. C’est assez difficile à résumer, mais j’écoute ce que veulent les designers de la console, je réfléchis aux différents composants de la console et j’intègre le tout du mieux possible.

Iwata :

Autrement dit, les designers de la console soumettent la forme qu’ils aimeraient donner à la console et de votre côté, en vue de rendre la production de masse possible, vous réfléchissez à la structure de ces composants et à la manière de les placer pour améliorer l’assemblage tout en passant en revue ses points forts et ses points faibles.

Goto :

Oui, c’est ça.

Akai :

Je m’appelle Akai du groupe de Planning et développement produit du service recherche et ingénierie. Pour que le développement de la console Nintendo 3DS se déroule sans accroc, j’ai travaillé conjointement avec le groupe de conception et avec celui de conception mécanique afin de passer du design au produit tel qu’il sera vendu. J’ai épaulé tous ceux qui sont ici.

Iwata Asks
Iwata :

Avant ce projet, vous faisiez partie du service ingénierie et évaluation du produit à l’usine d’Uji. Vous vous consacriez à la fiabilité et à la faisabilité des produits.

Akai :

Oui. J’ai longtemps travaillé à l’usine d’Uji et je connais bien les processus de production. Ainsi, en passant au développement, j’ai contribué à ce que la communication entre la production et le développement se passe bien.

Iwata :

Maintenant, nos deux designers pourraient-ils se présenter ?

Ehara :

Je m’appelle Ehara du groupe de design du service recherche et ingénierie. J’ai pris le projet en cours. J’étais chargé du design extérieur de la console et j’ai suivi le projet jusqu’au lancement de la production de masse.

Iwata Asks
Miyatake :

Je fais également partie du groupe de design. J’étais également chargé du design extérieur. Comme Goto-san du groupe de conception mécanique, j’ai travaillé au design du concept et j’ai collaboré avec Ehara-san jusqu’au démarrage de la production de masse.

Iwata Asks
Iwata :

Lorsque les designers pensent à quelque chose de nouveau, le dessinent-ils sur une feuille de papier ?

Miyatake :

Tout dépend de la personne, mais je fais des croquis que personne d’autre ne pourrait déchiffrer dans un carnet que j’ai sur moi.

Iwata :

Et vous, Ehara-san ?

Ehara :

J’écoute de la musique.

Iwata :

Pardon ?

Ehara :

Oui ?

Iwata :

Pour réfléchir à un produit ? (rires)

Ehara :

Oui. Au début, j’ai une image assez vague de la forme qu’il doit avoir et je cherche de la musique collant à cette image. J’ai travaillé sur les consoles Nintendo DS Lite1 et Nintendo DSi2 et elles ont chacune leurs morceaux. 1 Nintendo DS Lite : version amincie de la console de jeu vidéo portable Nintendo DS. Elle a été commercialisée au Japon en mars 2006.2 Nintendo DSi : console de jeu vidéo portable commercialisée au Japon en novembre 2008. Elle propose plusieurs évolutions telles que des écrans à cristaux liquides plus grands et deux appareils photo.

Iwata :

Les consoles Nintendo DS Lite et Nintendo DSi ont aussi leurs propres morceaux ?

Tous :

(rires)

Iwata :

Vous étiez également le pivot du design industriel de ces consoles. Quand vous les avez conçues, vous aviez également votre propre bande-son ?

Ehara :

Oui. C’est parce que, dans l’industrie, un design n’est jamais figé.

Iwata :

Même lorsque vous voulez exprimer quelque chose dans un design, vous rencontrez une série de problèmes en cours de développement, à savoir la possibilité de le réaliser ou de le produire, et vous devez parfois modifier le design contre votre volonté.

Iwata Asks
Ehara :

Oui, ça arrive tout le temps. Donc, pour ne pas perdre l’essence de ma première image, je choisis un morceau au début et je l’écoute sans cesse chez moi pendant mes moments de détente.

Iwata :

Vous l’écoutez sans cesse pour revenir à l’inspiration de départ ?

Ehara :

Oui. Et ce faisant, je pense parfois à d’autres approches qui ne m’étaient pas venues au début.

Iwata :

Waouh ! Je n’aurais jamais pensé qu’un design pouvait voir le jour en écoutant de la musique ! J’aimerais beaucoup savoir quel était le morceau emblématique de la Nintendo 3DS, mais je préfère laisser chacun choisir celui qu’il pense être le bon. (rires)

Tous :

(rires)

Iwata :

Combien de designers ont travaillé sur la console Nintendo 3DS ?

Miyatake :

Si l’on compte ceux qui ont travaillé sur les accessoires tels que la station de recharge, le stylet, la boîte pour cartes de jeu et le travail sur l’emballage ou le mode d’emploi par exemple, nous étions sept.

Iwata :

Depuis combien de temps travaillez-vous chez Nintendo ?

Miyatake :

C’est ma cinquième année.

Iwata :

Ce n’est que votre cinquième année et vous participez déjà au design d’un produit dans sa totalité.

Miyatake :

Oui. C’était la première fois que je travaillais sur le design externe d’une console et j’avais une certaine pression. S’agissant d’une nouvelle console, en tant que designer, il est arrivé que je peine à faire passer l’idée de nouveauté.

Iwata :

Il est difficile de trouver le bon équilibre entre garder certains éléments du design et en modifier d’autres.

Miyatake :

Tout à fait. Lorsque j’ai rejoint le projet, il avait déjà été décidé que la console aurait deux écrans, dont un tactile, et nous ne pouvions pas en changer la taille. Ainsi, quoi que nous fassions, en l’ouvrant pour la première fois et en voyant les deux écrans, les consoles précédentes vous viendraient fatalement à l’esprit. Il était difficile de trouver comment faire pour qu’elle paraisse nouvelle.

Iwata Asks
Iwata :

Ehara-san, quand avez-vous été affecté au projet ?

Ehara :

Aux environs de novembre 2009. Avant, je participais au démarrage de la production de masse de la console Nintendo DSi XL3. 3 Nintendo DSi XL : console de jeu vidéo portable dotée des mêmes fonctions que la Nintendo DSi, mais équipée d’écrans plus grands. Elle a été commercialisée au Japon en novembre 2009.

Iwata :

Quelle impression avez-vous eue du projet en voyant ça de l’extérieur ?

Ehara :

Je me suis dit : « Ça n’a pas l’air simple. »

Iwata :

Et vous vous êtes retrouvé happé ! (rires)

Ehara :

Oui. Depuis la console Nintendo DS Lite, notre style et notre approche du design n’avaient pas beaucoup changé et, en voyant le prototype de la Nintendo 3DS que Miyatake-san avait conçu, j’ai pensé qu’il collait trop aux designs précédents et qu’il n’y avait rien de nouveau ni de percutant. Bien entendu, c’était une des hypothèses de travail possible, mais j’avais travaillé sur les consoles Nintendo DS Lite et Nintendo DSi et je me suis dit que c’était de mon devoir de marquer une rupture avec le passé.

Iwata :

Vous voulez dire que vous avez intégré ce projet avec le sentiment qu’il vous revenait de marquer une rupture, car vous étiez celui qui avait conçu le design des consoles depuis la Nintendo DS Lite ?

Ehara :

Oui. Je me suis peut-être dit que mon rôle consistait à avoir un tas d’idées qui ne seraient jamais approuvées. Par conséquent, après mon arrivée dans l’équipe, j’ai essayé de faire bouger les choses au maximum.

Iwata :

Autrement dit, vous vous êtes dit que tout le monde restait bloqué sur le design original que vous aviez conçu et qu’il fallait proposer plusieurs designs qui ne seraient pas acceptés pour les mettre en porte-à-faux et les pousser dans une nouvelle direction.

Ehara :

Oui. J’étais convaincu que si nous n’opérions pas une rupture, nous continuerions dans la même veine.